Perdu dans le mouvement agité de la foule,
Qui nous rend anonyme et nous brasse comme la houle,
J’ai senti un contact, j’ai senti un frôlement :
Pourquoi seulement le tien dans ce chambardement ?
J’ai tout juste eu le temps, de croiser ton regard,
Pour voir la solitude dans tes yeux bleus, hagards ;
Moi aussi j’étais seul, j’ai voulu te parler ;
Mais le flux t’a portée et tu t’en es allée.
Ton visage m’a marqué : j’ai cru voir une sirène,
Loin de sa plage natale, plutôt dans une arène,
Éplorée, désireuse qu’on s’occupe un peu d’elle,
Mais, qui partait au large, meurtrie, à tire-d’aile.
J’aurais voulu savoir stopper l’horloge du temps,
Pour te connaître, j’avais le cœur tout palpitant,
J’ai tout fait pour quitter cette marée en déroute ;
C’est à contre-courant que j’ai tracé ma route.
J’espérais te rejoindre, pouvoir te consoler,
Tu me semblais si seule, tu semblais affolée ;
Entre nous un déluge de personnes s’est dressé,
Me laissant là sur place, échoué et blessé.
J’ai lancé un appel comme un cri de détresse,
J’ignorais tout de toi : ton nom et ton adresse ;
J’étais un naufragé sans repères, sans amers,
N’ayant plus, comme espoir, qu’une bouteille à la mer.
Je m’accroche à l’idée que tu puisses repasser
Et sortir de ces flots, que je puisse t’enlacer.
Tu as fait naître en moi un amour éperdu ;
La foule blasée te garde et je me sens perdu.